J'ai toujours eu l'angoisse de la réussite scolaire. Moins
de 18 sur 20, et je stresse. Panique sur les chiffres, auto-pression permanente.
Vincent, pas du tout. Evidemment, à la narration des premiers week-ends à Albi,
je doute de l'adaptation de mon frère à l'attendu normatif de la machine
éducative française. Surtout celle des classes préparatoires. Ma mère est aussi
très inquiète. Comme toujours elle est prête à traverser tous les océans du
monde pour donner ne serait-ce qu'une gorgée d'eau à ses enfants. Ma maman est
géniale. En l'occurrence, en ce mois d'octobre, sa mission de sauvetage est la
rédaction sine die d'un devoir à la maison de français à partir de la lecture
de l'ouvrage de Levi-Strauss. Certes Vincent n'a pas lu l'ouvrage. Certes la
demande téléphonique à l'aide maternelle est arrivée 48h avant l'échéance.
Certes ma mère sacrifie une nuit pour relire le dit ouvrage. Mais le français,
attention c'est sa spécialité. Elle met du cœur à l'ouvrage, elle lit, rédige,
rature, corrige, recopie. Quelques pauses minimalistes, et elle repart à
l'ouvrage pour son fils. Ultime sacrifice, la livraison. C'est après une longue
journée de travail à Mazamet, retour à Revel, puis demi-tour vers Albi. 220km
dans la journée pour amener la dissertation toute rédigée au fils prodigue. Je
suis du voyage. C'est expéditif. Voici la copie, merci au revoir, retour à
l'internat, retour à Revel pour les autres. Une semaine après, la sentence
tombe. 4 sur 20. On vient d'assassiner maman. Tristes tropiques.