Des premières années de ma vie, je retiens de mon frère son
côté tête brûlée. Ensuite en grandissant, la première impression se figera.
J'avais 4 ans. Nous flânions dans les rues de Mazamet avec notre maman. Il
m'explique un nouveau jeu. Chouette. Non il ne s'agit pas d'éviter les traits
par terre, de sauter à cloche pied sur les pavés ou de tourner dix fois autour
du lampadaire. Non le jeu c'est de traverser l'avenue en fermant les yeux.
Juste pour l'adrénaline. Explications additionnelles pour finir de me convaincre.
Il suffit de bien regarder avant et de compter dans sa tête pour éviter les
voitures. Il démarre le jeu. Il n'a pas fait 3 bandes blanches du passage
piéton que maman l'attrape et le sermonne. Echec. Et injustice. Il me le
souffle à l'oreille, il allait réussir.
Dans la même période, dans d'autres lieux, mais avec la même
énergie, mon grand frère, mon modèle, que je prends grand soin à admirer
attentivement, et à ne pas imiter, repasse à l'action. Il se fracasse ses
incisives toutes neuves sur le sol en béton de la halle du village d'Auriac, il
se rougit le torse en tentant l'impossible du plongeoir de 5m de Puylaurens, il
prend un choc électrique en défiant Philibert, il tente la course de vitesse à
vélo contre un essaim de guêpes, il brave la punition paternelle en s'échappant
au-delà du clocher de Notre Dame, il se cache sur le toit du préau de l'école
entre 2 averses, etc... Moi j'ai toujours peur, et je préfère rester bien
protégé au chaud, dans les jupons de ma maman. Et puis inutile de tenter le
diable, je n'ai qu'à le regarder pour vivre par procuration des aventures
inédites.
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