Papa l'a décidé. Nous allons à Novalaise ce mois d'août,
c'est pour l'occasion d'une fête d'anniversaire de mariage d'oncle et tante.
Nous y allons très rarement à Novalaise. Pourtant, papa nous raconte
régulièrement avec beaucoup de nostalgie ses voyages à lui en Savoie quand il
était petit. Notre sang savoyard, notre fierté nous rappelle-t-il. Vincent est
à l'aise, il connaît beaucoup mieux que moi toute cette famille. En 1990,
l'année dernière, il est parti, pour son premier job d'été, travailler dans le
restaurant de René, la Bergerie. Il a logé chez Maurice et Yvette, jeunes
retraités alors. Il avait oublié de descendre du train à l'arrivée, ça
présageait du meilleur. Cette fois, nous voici une nouvelle fois embarqués dans
la tournée du Perret, du Menou, chez tante Marie-Thérèse, etc... Au Perret,
c'est l'effervescence, le cousin François vient de gagner à l'émission la Roue de
la Fortune. Il a décroché de nombreux cadeaux, dont le gros lot, une AX
blanche. Il y a beaucoup de monde, la VHS de l'émission tourne en boucle, on en
profite, puis les cadeaux sont passés en revue. Vincent retient en particulier
le fameux skateboard à moteur, dont la vie commerciale très avant-gardiste n'a
toujours pas décollé. Une séance d'essai immédiate sur la route devant la ferme
s'organise. Tout le monde rit, le temps passe, Vincent prend l'initiative. Il
me défie de monter le pic de l'Epine en bicyclette. Je ne sais de quoi cela
ressort, il m'explique qu'il l'avait fait en 90, et que je n'y arriverai pas
sans poser le pied par terre. La discussion s'anime avec nos cousins sur cet
exploit sportif, ils nous prêtent 2 vélos oranges un peu dans leur jus, et nous
voilà parti tous les deux. Je suis Vincent de près, je serai bien incapable de
revenir. Vincent se moque de moi car à 500 mètres de l'arrivée, je crois que ça
descend déjà tellement la pente était dure. Pas de pause, on redescend déjà
vers le lac d'Aiguebelette. Je m'inquiète, mon vélo ne freine pas beaucoup.
Vincent m'arrête, il inspecte mon vélo. Nous sommes seuls sur une toute petite
route de montagne, quasiment en haut du col, et encore assez loin du village.
Il décide d'échanger nos bicyclettes. C'est Vincent, mon grand frère, qui me
protège. La descente reprend. Il passe rapidement devant moi. Les freins
lâchent au bout de 2 virages. Je l'entends hurler. Il descend à toute vitesse.
Il passe les virages à gauche de la route. Une voiture peut surgir en face à
tout moment. Il va trop vite. Je ne le vois plus. Une minute passe, je suis
seul. Je continue à descendre, très inquiet. Il m'appelle. Il a réussi à filer
droit sur un sentier en terre qui remontait, à la sortie d'un virage. Ca l'a
arrêté. Ouf. Je veux repartir à pied. Allez, dépêche-toi, me souffle-t-il. Et
il repart de plus belle. Je le rejoindrais en bas de la pente, au village. Il
fait remarquer aux cousins que le vélo n'a plus de frein. J'acquiesce
timidement. Oui, en effet, ils le savent. La journée continue. Sans lui,
c'était moi qui partait sans contrôle sur la route du col, et je ne pense pas
que j'aurai eu le sang froid de foncer vers ce sentier cabossé. Il m'a sauvé
par anticipation.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire